IMPRESSIONS du voyage au Mali
Ivona Prémel

du 23 novembre au 4 décembre 2003
 
     
      Voilà quatre semaines que j'ai remis le pied à terre depuis mon retour du Mali et pourtant, j'erre encore par la pensée dans ce fabuleux pays parmi les Peuls, les Bozos, les Touaregs ou les Dogons...  
     
 

    << Mon premier cri du cour sera d'abord, un cri d'admiration pour l'association Ségou-Breizh pour tout le travail réalisé déjà envers nos frères Maliens. Je puis me permettre de mentionner cette admiration pour tout ce travail fait en amont, personnellement, je me considère donc comme " chanceuse, d'avoir eu cette opportunité de participer à " cette expédition ".>>

 
     
 
    J'avais, comme toute personne qui connaît mal l'Afrique noire, des clichés sur cette partie du monde. Il a fallu que je foule la poussière de ce pays, de Bamako à Djenne en passant par Segou bien sûr puis Mopti et j'en passe, pour me rendre compte de la réalité de la situation. C'est d'abord la pauvreté mais aussi leur grande capacité à vivre avec si peu qui m'a le plus frappée. En effet, j'ai rencontré des Maliens chaleureux, accueillants, souriants face à des visiteurs comme nous, qui vivons le plus souvent aux antipodes de nos hôtes. Ce fut aussi une remontée dans le temps et j'ai du mal à me fixer sur une échelle quelconque, mais j'ai quand même le sentiment que parfois, je me suis projetée dans la fin du néolithique, surtout lorsque nous sommes rentrés dans certains villages et avons assisté à quelques scènes de la vie quotidienne, à quelques anachronismes près , que vous me pardonnerez.
 
     
      Autre choc, que celui de notre visite à l'hôpital de Bamako où nos yeux, malgré nous, s'embuent instantanément devant le peu de moyen qu'ont " les médicaux " pour soigner, pour réconforter, pour apaiser les souffrances physiques ou encore les plaies morales de leurs patients. Quel dénuement, à vous arracher le cour et quelle impuissance ressentie devant l'immensité de la tâche ! Comment oserai-je, après ces visites, me plaindre " des soins médicaux luxueux " dont je bénéficie, en Bretagne ? Ce serait folie, sans doute !  
     
      Le manque d'hygiène frappant qui menace de toutes parts les Maliens, en particulier, les enfants, nous pousse , inévitablement, à sentir l'urgence d'un mieux à leur apporter et, plus urgent encore, à faire naître, chez eux, une prise de conscience qui les amènerait à prendre eux-mêmes, ce problème en main, or nous savons aussi qu'ils n'en n'ont pas les moyens. Face à ce constat, nous ne devons pas pour autant, baisser les bras.  
     
 
    Encore des impressions diverses, pardonnez ce " pèle- mêle ", mais je tiens cependant à noter que ce pays aux mille couleurs, aux mille odeurs, aux mille bruits scandés de temps à autre par des percussions qui rythment leurs travaux ou leurs danses, suscite notre admiration ! Ce qui m'a surtout, le plus subjugué, tout au long du séjour, c'est la beauté des femmes, surgissant à chaque instant, telles des nénuphars multicolores splendides sur un lac de sable ocre... Quel tableau vivant et permanent !
 
     
      Peuple riant, accueillant, dont les yeux sont cependant, interrogateurs à l'approche " des riches habitants de la Terre, que nous sommes ! ". J'ai souvent éprouvé de la honte de notre chance à être nés sous une autre étoile qu'eux et pourtant, je reste persuadée qu'ils ont des leçons multiples à nous donner que je ne peux développer ici.  
 
 
      Terre aux paysages fabuleux et à l'évocation de ceux-ci, ma mémoire, glisse soudain au pied de la grande et énigmatique falaise du pays Dogon qui abrite les villages splendides à vous couper le souffle ! La culture de ce peuple m'a fascinée et ce " trekking " accompli à travers ces villages restera un souvenir indélébile. Je ne puis non plus m'empêcher, parmi les paysages qui se gardent en mémoire , de mentionner ceux que nous avons pu admirer de " la pinasse ", alors que nous glissions sur le Niger ou sur son affluent, le Bani. C'est grâce à ce moyen que nous avons pu découvrir les villages de pêcheurs et même goûter à leurs petits poissons grillés sur feu de bois.  
 
 
      Peuple de marchands aussi, sollicitant sans cesse les voyageurs que nous étions, pour nous proposer leurs divers objets artisanaux. Comme tout un chacun, je me suis piquée au jeu du marchandage qui finalement permet de créer certains liens fort sympathiques.  
 
 
      Peuple courageux et je mentionne ici, les enfants se rendant à l'école, pieds nus la plupart du temps, un seul petit cahier recouvert de papier craft sous le bras, dans l'autre main, le petit pochon, contenant la galette de mil ou la portion de fonio, restants du repas de la veille. Une heure et demie de marche pour plusieurs, pour se retrouver dans une classe où chacun retrouvera ses 70 ou 100 camarades ! J'ai poussé mon indiscrétion, jusqu'à demander à un gentil garçon de Cours moyen 2ème année, de me montrer son cahier. Avec fierté et me regardant dans les yeux, il m'a dit " je veux être docteur ". Le contenu de son cahier étonnerait plus d'un enseignant, chez nous ! J'ai pu y lire la leçon de science sur la vue, résumée en deux lignes avec un minuscule schéma griffonné au crayon de papier, faute de crayons de couleur, je suppose et à peine deux autres lignes pour donner la différence entre la préhistoire et l'histoire ! Encore un pincement de honte en songeant au gaspillage existant chez nos élèves ! Et aussi pour parler des adultes, désireux de savoir, mais privés du moyen de le faire, je citerai l'exemple de ce directeur de collège de Cinzana qui nous a confié que son bonheur le plus grand était de lire, mais il n'avait plus rien à se mettre sous la dent. Il a "caressé " longuement les livres que nous lui tendions et je ne vous décris pas son immense joie, lorsque nous lui avons signifié qu'il pouvait les garder ! Satisfaction, facile à combler, me direz-vous !  
 
 
      Les souvenirs défilent ainsi nombreux et si divers qu'il faudrait des pages et des pages pour les immortaliser sur papier, mais je ne veux pas prendre trop de votre temps, c'est déjà sans doute trop long, veuillez m'en excuser, ce n'était que l'envie de partager avec chacun de vous un bonheur vécu dans cette partie du monde avec, je le signale aussi, des gens du groupe que nous formions, formidables, ayant le sens de la solidarité et du partage. Que chacun d'entre eux soit ici remercié ! J'y ai beaucoup appris et n'est-ce pas gagné, puisque le rêve de repartir est déjà naissant ?  
     
     
 

Ivona Prémel
Mes impressions du Mali
Samedi 10 janvier 2004